Retour à tous les événements

Nous deux

Schamyl Bauman

Suède | 1939 | 1h31 | VOSTF

Titre original : Vi två

Présenté par Sofia Norlin, réalisatrice Suédoise


Le jeune architecte Sture Ahrengren, employé du professeur Hagstam à Stockholm, souhaite avoir un enfant avec sa femme Kristina : mais celle-ci repousse le projet, désireuse d’attendre que son mari gagne de meilleurs revenus en se mettant à son compte. Dans ce but, Sture participe à un concours pour l’installation de bains en plein air, pour lequel il remporte le troisième prix. À la suite d’un conflit avec Hagstam, qui estime que son employé ne devrait mener aucun projet en dehors du cadre de l’entreprise, Sture démissionne.

Il rencontre par hasard un ami de jeunesse, Baltsar Ekberg, qui a fait carrière aux États- Unis avant de rentrer à Stockholm où il s’est installé comme ingénieur du bâtiment. Il propose à Sture Ahrengren de dessiner les plans de reconstruction et d’agrandissement de la villa du consul général Odelgren qui lui en a passé commande. Sture rencontre alors l’épouse de son ami, Helena, qui le plonge dans un certain trouble.

Diverses complications retardent la reconstruction de la villa, et les travaux sont un temps suspendus. Pendant ce temps, Sture décide d’aller prendre quelques jours de repos dans le chalet que Baltsar lui a prêté. Helena y surgit alors, et Sture en oublie complètement sa femme. Avec l’aide de l’ancien maître de catéchisme de Sture, le Dr Frodde, celle-ci lui montre l’absurdité de ses sentiments et parvient à le ramener sur terre. La situation s’apaise.

Helena et Baltsar se rendent au chalet. Sture et Kristina sont sur la route pour les rejoindre quand ils ont un accident de voiture, dans lequel Kristina est légèrement blessée. Au même moment, le professeur Hagstam, atteint par la maladie, est admis à l’hôpital. Il demande à Kristina de venir le voir et lui annonce son projet de faire de Sture son associé. Les deux hommes se réconcilient, la construction de la ville reprend, et, face à cet avenir professionnel prometteur, Kristina accepte d’avoir un enfant.

Nous deux (Vi två) est une adaptation du roman de Hilding Östlund (1894-1969) La femme de votre voisin, qui paraît en 1936. L’écrivain suédois participe à l’élaboration du scénario avec Ragnar Hyltén-Cavallius.

Schamyl Bauman s’inscrit avec Nous deux dans le genre de la comédie de remariage, alors extrêmement populaire à Hollywood et dont les productions se concentrent essentiellement entre le milieu des années 1930 et la fin des années 1940 : New York Miami, de Frank Capra, qui dessine les contours du genre, sort en 1934, L’impossible monsieur Bébé, de Howard Hawks, en 1938, et Madame porte la culotte, de George Cukor, qui clôt cette période, sort en 1949. La ligne narrative repose essentiellement sur une série d’obstacles rencontrés par un couple déjà constitué, et qui permettent à celui-ci de découvrir ou de retrouver une harmonie absente à l’ouverture du récit. Si les comédies américaines n’abordent jamais de front la question de l’adultère ou des relations sexuelles hors mariage, en raison de l’application très stricte du code Hays dans les années 1930-1940, le film suédois, lui, peut se permettre de faire intervenir le désir pour une autre femme comme obstacle principal à la félicité conjugale.

En 1940, Schamyl Bauman réalise une suite libre de ce film avec Nous trois (Vi tre), dont le récit, plus tragique, réemploie les mêmes personnages et découvre de nouveaux obstacles au couple Ahrengen : leur petite fille est née, mais Sture rencontre d’importantes difficultés professionnelles qui aboutissent à la faillite de son entreprise. C’est Kristina qui, dans ce film, rencontre un autre homme, ce qui mènera le couple au divorce. Mais le film se soldera par les retrouvailles de Sture et de Kristina, s’inscrivant au sens strict dans le genre de la comédie de remariage.


« On a depuis peu commencé à entendre dire que le cinéma suédois avait besoin d'humour et d’un langage plus quotidien. En réaction justifiée à un ton théâtral vieillot et emphatique, on a tendance à accepter la platitude comme signe d'un nouveau style. On a tendance à gommer la frontière entre le dialogue artistique et les inepties, entre le style et la calomnie, entre la spiritualité et la stupidité. C’est ainsi d’autant plus appréciable de pouvoir à la fois voir et entendre, dans Nous deux, une légèreté d’improvisation qui ne tombe jamais dans le vulgaire. Sans doute, le roman qui sert de fond au film, La femme de votre voisin de Hilding Östlund, est-il d’une tonalité simple et juste. En tout cas, Ragnar Hyltén-Cavallius n'a jamais eu la main aussi heureuse pour bâtir un scenario. Tout porte aussi à penser que Sture Lagerwall et Signe Hasso ont contribué à donner aux dialogues leur expressivité. Si vous cherchez quelque défaut à pointer, bien sûr, c’est possible. En particulier, un peu de douceur sirupeuse (goût suédois) dans le ton de comédie, ici et là, et une attendrissante simplification de la question des enfants dans le mariage. Mais on s’abstiendra de tomber dans la critique au vu de la fraîcheur gracieuse et du sérieux mêlé d’humour de cette comédie délicieuse toute empreinte de jeunesse et d’ouverture. On invitera simplement le public à noter le phrasé exquis des deux jeunes artistes doués, secondés par Stig Järrel et Ilse-Nore Tromm, cette dernière particulièrement. Tout ce quatuor a touché le public directement au cœur. Alors que Carl Barcklind en ancien maître religieux et Gösta Cederlund en vieux grincheux ont été applaudis pour leurs maximes sur l'amour et la procréation. Schamyl Bauman a donné au film un rythme divertissant, qui colle bien au récit, plein de trouvailles, sans complications. Un succès bien mérité. »Per Lindberg, Dagens Nyheter, 16 mars 1939.

« Le tout est clair, juste, solide et sympathique. Les scènes s'enchaînent facilement et naturellement, le dialogue coule sans effets, comme si de rien n'était, comme si on était familier du réalisateur Bauman et le jeu reste plutôt léger et d’une tonalité de comédie sérieuse, juste comme il se doit. Cependant, une objection à la composition purement historique de l'histoire peut difficilement être oubliée ; ce qui aurait dû être un court épilogue, une fois le conflit résolu et les divers nuages d'inquiétude dissipés, se transforme à la place en un moment de naïve propagande nataliste… Certes, c’est charmant, ce fut bien reçu… mais c’est hélas totalement inutile. Cette digression par rapport à la construction dramatique est cependant la seule réserve sérieuse que l’on peut avoir sur Nous deux. Le film est sans prétentions, attrayant, techniquement bien fait et divertissant. Il montre de manière convenable une tranche de vie quotidienne moderne avec des jeunes gens modernes. Parfois, c'est banal – comme la vie l’est souvent, un brin sentimental comme peut l'être la réalité. Le couple Signe Hasso et Sture Lagerwall a maintenant atteint un naturel qui donne à toutes les scènes intimes le charme nécessaire, ils sont jeunes et amoureux de manière à la fois spontanée et raffinée. Le jeu extrêmement sensible de Mme Hasso élève parfois la performance à un niveau proche de celui de Bergner, même si le rôle ne mène pas à une interprétation particulièrement variée. » Svenska Dagbladet, 16 mars 1939.


Réalisation Schamyl Bauman. Production Lorens Marmstedt. Société de production Terrafilms Produktions AB. Scénario Ragnar Hyltén-Cavallius et Hilding Östlund (d’après le roman de Hilding Östlund, La femme de votre voisin). Photographie Hilmer Ekdahl. Direction artistique Arthur Spjuth. Montage Tage Holmberg. Musique Sten Axelson et Sam Samson. Distribution Sture Lagerwall, Signe Hasso, Stig Järrel, Ilse-Nore Tromm, Gösta Cederlund, Carl Barcklind, Torsten Hillberg. Durée 91 minutes. Sortie en Suède 1939.


Affiche Nous Deux.jpg
Événement antérieur: 13 novembre
Leçon de Cinéma avec Yannick Hanael
Événement ultérieur: 13 novembre
La Grande solution (La Peste blanche)